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14 janvier 2014 2 14 /01 /janvier /2014 16:26

Débat sur les conclusions

de la mission commune d'information

sur l'avenir de l'organisation décentralisée de la République 

Intervention de Jean-Michel Baylet

 

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Baylet.

M. Jean-Michel Baylet. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la mission commune d'information, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, existe-t-il meilleur lieu que cet hémicycle pour débattre de l'avenir de l'organisation décentralisée de notre république ? Je ne le pense pas.

En effet, les sénateurs qui, aux termes de la Constitution, assurent la représentation des collectivités, peuvent, en la matière, se prévaloir d'une expertise et même d'une expérience hors du commun. En serait-il de même, si, un jour, notre assemblée ne comptait dans ses rangs ni maire ni président de collectivité ? J'en doute fortement ! (Mme Sophie Primas et M. Bruno Retailleau applaudissent.) Il est encore temps de ne pas mal faire !

 

M. Jacques Mézard. Eh oui !

 

M. Jean-Michel Baylet. Les enjeux territoriaux sont pourtant toujours au cœur de nos travaux. En témoigne le débat qui se tiendra demain, ici même, à l'initiative du groupe RDSE et de son président, Jacques Mézard, sur la politique du Gouvernement en matière d'égalité des territoires. Il faut souligner, en tout cas, la qualité des travaux de la délégation sénatoriale aux collectivités et à la décentralisation, présidée par Jacqueline Gouraud.

Depuis la loi du 28 mars 2003, il est inscrit à l'article 1er de notre Constitution que l'organisation de notre République est décentralisée. Cela rappelle sans doute quelque chose au président Raffarin !

Longtemps attendue et espérée, la grande réforme que devait être l'acte III de la décentralisation a cédé la place à divers textes. Pour le dire autrement, l'acte III se joue en plusieurs scènes. (Sourires.)

Des textes touchant à l'organisation des collectivités ont cependant déjà été adoptés, depuis juin 2012. Je pense notamment à la loi relative à l'élection des conseillers municipaux, des conseillers communautaires et des conseillers départementaux, avec la fâcheuse introduction de l'élection par binômes.

 

M. Bruno Sido. Ah !

 

M. Jacques Mézard. Il est excellent !

 

M. Jean-Michel Baylet. Plus récemment, l'année 2013 s'est achevée par le vote du projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles. Enfin, à la fin du mois, nous débattrons, en seconde lecture, des projets de lois interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec les mandats de parlementaires.

Je le répète, madame la ministre, il est encore temps de ne pas mal faire !

 

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Je n'ai pas la main !

 

M. Jacques Mézard. Perseverare diabolicum !

 

M. Jean-Michel Baylet. La mission commune d'information créée en avril dernier, à l'initiative de nos collègues du groupe UMP, ambitionnait de s'affranchir des calculs politiciens en privilégiant une approche constructive et transpartisane. On peut, certes, s'interroger sur l'opportunité d'engager un tel travail prospectif, à l'horizon 2020, alors que nous examinions, concomitamment, plusieurs textes d'importance touchant aux mêmes sujets.

Les griefs les plus récurrents à l'évocation de l'administration de nos territoires sont la lourdeur et le manque de lisibilité des processus de décision. La mission commune d'information nous propose donc dans son rapport d'adapter cette architecture aux défis de notre temps, tout comme elle ambitionne de rénover le cadre institutionnel et de l'appliquer à des territoires différents. Je tiens à rendre hommage au travail d'animation et de médiation réalisé par le président Jean-Pierre Raffarin et le rapporteur Yves Krattinger.

Dans le temps qui m'est imparti, il me sera impossible d'aborder l'ensemble des pistes que vous tracez, mes chers collègues. Vous me permettrez de ne pas m'attarder sur l'indispensable réforme de la gouvernance des grandes métropoles, ni sur les perspectives que vous tracez pour l'intercommunalité. Je me suis exprimé sur ces points en des temps anciens, quand j'en avais la charge au sein du Gouvernement.

 

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Je m'en souviens !

 

M. Jean-Michel Baylet. Je reviendrai plutôt sur le premier axe de réflexion du rapport, qui s'attache à la présence de l'État et des services publics dans les territoires. Il s'agit, aux yeux de nos concitoyens, de la manifestation essentielle, et la plus visible, de la puissance publique. Ces dernières années, malheureusement, cette présence s'est réduite, singulièrement dans les zones les plus sensibles et les plus fragiles : les zones rurales.

Ce désengagement a alimenté le sentiment d'abandon ressenti par des populations et des territoires entiers. Il est bien réel ! Pourtant, face à ce mouvement, des initiatives sont nées. Dans mon département, le Tarn-et-Garonne, nous avons travaillé dès 2008, avec l'association des maires et la préfecture, pour créer les conditions de l'élaboration d'un schéma départemental de présence postale, permettant le maintien de la plupart des agences et privilégiant le dialogue et la concertation.

Sur le plan institutionnel, le rapport préconise une diminution du nombre de régions – entre huit ou dix -, avec la perspective de leur conférer une taille européenne. Nous aurions dû faire cela autrement, plutôt que de les couper en deux à leur création pour satisfaire tel ou tel baron ! Cette direction est la bonne.

Ce rapport réaffirme également la place centrale du département, notamment dans les zones rurales, comme lieu de la solidarité et de la proximité. Voilà bien la reconnaissance de la réalité des choses, depuis que la République, dans les conditions que nous savons, a créé cette collectivité !

Je mesure le caractère explosif de ces propositions, qui vont à l'encontre de l'argument à la mode – la sagesse de cette assemblée invite pourtant à se méfier des modes – trop souvent entendu, y compris ici tout à l'heure, qui voudrait que le département soit une structure « périmée, parce qu'ancienne », ainsi que vous le mentionnez dans le rapport. Vous ajoutez « l'enracinement historique du département lui confère sa légitimité. » C'est ce à quoi je faisais allusion à l'instant en parlant des conditions de la création des départements, décidée pour, d'une certaine manière, sauvegarder la République.

Ainsi qu'il a été dit à plusieurs reprises lors des auditions, nos concitoyens sont attachés à leurs départements, comme à leurs 36 000 communes et à leurs maires.

Vous proposez la création de grandes régions, plus adaptées au grand jeu européen, et disposant de réelles missions d'aménagement du territoire, de développement économique. Cela va dans le bon sens : à la région, la stratégie, au département, la proximité et l'efficacité. Ainsi, nos concitoyens gagneront en lisibilité et en compréhension des processus, et nous ferons preuve d'une meilleure efficacité.

 

M. Bruno Sido. Tout à fait !

 

M. Jean-Michel Baylet. Dans son sixième axe de propositions, le rapport s'attache à la question du rôle des parlementaires dans la décentralisation. Nous le voyons, notamment lors de l'examen des projets de loi de finances, nous sommes confrontés à des difficultés dans l'accès aux données, ou à la transmission de données tronquées de la part de certaines directions.

M. Raffarin le sait mieux que quiconque : si même le Premier ministre se trouve parfois face au « mur de Bercy », que dire alors des parlementaires que nous sommes ? Je souscris donc pleinement à l'idée de doter le Parlement de moyens d'expertises propres. Là encore, le Sénat, « grand conseil des communes de France », a un rôle particulier à jouer.

Les relations financières entre l'État et les collectivités sont trop souvent complexes et empreintes d'une méfiance réciproque, qui ne va pas en s'arrangeant. L'autonomie financière des collectivités est pourtant inscrite à l'article 72-2 de la Constitution.

Lors de ses vœux aux Français, tout récemment, le Président de la République a rappelé son engagement en faveur de la maîtrise de la dépense publique, notamment en ce qui concerne les compétences des collectivités, qui devront être clarifiées. Oui ! Mais, dans son rapport, la mission commune d'information pointe le manque de lisibilité et le caractère inégalitaire des finances locales, ce qui accroît les fractures entre collectivités. Nous cherchons une solution équilibrée, au sein de l'Assemblée des départements de France, cher Bruno Sido, depuis tant d'années !

Et que dire des transferts de compétences ? En 2010, le rapport de nos collègues Éric Doligé et Claude Jeannerot pointait déjà des perspectives inquiétantes pour les finances locales, liées à l'évolution prévisible des charges résultant de ces transferts de personnels de l'État vers les collectivités, sans compensation. Disons-le fortement mais d'une manière positive, madame la ministre, il n'y aura de véritable décentralisation que lorsque l'on accordera aux collectivités locales une véritable autonomie financière et fiscale.

Enfin, je conclurai mon propos en rendant hommage aux 550 000 élus locaux, qui accomplissent une tâche remarquable. Ce sont eux qui assurent un rôle de premier plan dans le développement des territoires, le fonctionnement des services publics et le maintien du lien social. Ce sont eux qui furent, par exemple, en première ligne lors des récentes inondations en Bretagne.

Il faut donc nouer de véritables pactes de confiance entre l'État et les collectivités, car ce sont elles qui font vivre la démocratie au plus près de nos concitoyens. Je sais, madame la ministre, que vous-même, comme l'ensemble du Gouvernement, en êtes convaincue. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste et de l'UMP.)

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