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20 novembre 2015 5 20 /11 /novembre /2015 17:05
Au Sénat : Débat sur le rôle du bicamérisme 

 

Intervention de Jacques Mézard
Mme la présidente. L'ordre du jour appelle le débat sur le thème : « Bilan et perspectives du rôle du bicamérisme dans nos institutions après la publication du rapport du groupe de travail sur l'avenir des institutions intitulé Refaire la démocratie », organisé à la demande du groupe du RDSE.

La parole est à M. Jacques Mézard, orateur du groupe auteur de la demande. (Applaudissements sur les travées du RDSE.)

M. Jacques Mézard, au nom du groupe du RDSE. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je l'ai plusieurs fois rappelé à cette tribune, l'existence du groupe du RDSE, héritier de la Gauche démocratique, est consubstantielle à celle du Sénat de la République.

Aussi est-il légitime et naturel que notre groupe unanime, ulcéré par les provocations réitérées du président de l'Assemblée nationale contre le Sénat, prenne l'initiative, dans son espace réservé, d'un débat sur l'avenir du bicamérisme en France. (M. Yvon Collin opine.)

M. Philippe Bas. Il était temps !

M. Jacques Mézard. Au moment où l'unité nationale est invoquée heure par heure, à juste titre, est-il bien opportun, depuis janvier dernier et quelques jours après les attentats, que l'on remette en cause formellement l'existence du Sénat pour en faire un « pôle de contrôle parlementaire » sans aucun pouvoir réel ? Une assemblée émasculée dont nous ne doutons pas que les membres seraient désignés à la sauce du Conseil économique, social et environnemental, le CESE, ce qui se passe sur ce point de tout autre commentaire qui pourrait être désobligeant… (Sourires.)

Mme Françoise Laborde. Tout à fait !

M. Yvon Collin. Très bien !

M. Jacques Mézard. Sous prétexte de rénovation, le groupe de travail lancé par M. Bartolone détruit clairement le bicamérisme en reprenant dans sa proposition n° 10 les mêmes arguments fallacieux que ceux qui avaient été employés ici même au Sénat le 19 décembre 1968 par le ministre d'État Jeanneney venu dans cet hémicycle soutenir sans succès le projet de référendum du Président de Gaulle qui allait entraîner in fine sa démission.

J'ai dit que ce groupe de travail reprenait les mêmes « arguments fallacieux » que ceux utilisés en 1968, car sa composition reflète le même penchant partisan que celui de la trop célèbre commission Jospin sur la transparence de la vie publique.

Comment veut-on maquiller la destruction du Sénat ? La citation d'une seule phrase suffit : « La fusion du Sénat et du CESE redonnerait tout son sens à un bicamérisme fondé sur la complémentarité, et offrirait une tribune plus efficace aux forces actives de la nation pour faire entendre leur voix. L'enjeu d'une telle réforme n'est pas de diminuer le rôle du Sénat, mais est de mettre fin aux doublons et aux redondances de la procédure législative. La Ve République établit déjà un bicamérisme inégalitaire, il s'agit d'en tirer enfin les conséquences. »

Tout est dit. La manœuvre est grossière, éculée.

Comme le firent le président Monnerville et ses collègues pour le référendum de 1969, il nous revient, au nom du respect de nos institutions – ce mot a encore davantage de sens après ce que notre pays vient de vivre –, à nous, Sénat de la République, d'éclairer nos concitoyens, dans une Ve République qui a dérivé vers une hypertrophie du pouvoir présidentiel au détriment du Parlement, sur la nécessité de préserver et de rétablir un équilibre institutionnel. Pour cela, le Sénat législateur est indispensable.

Mes chers collègues, nous n'allons pas, comme le président de l'Assemblée nationale, embaucher une journaliste du Monde pour écrire un livre d'apologie. (Sourires.) Nous allons ici, mais aussi dans tous les médias et dans chacune de nos circonscriptions, dénoncer une stratégie populiste contraire aux intérêts de la nation, encore plus aujourd'hui qu'hier.

Cette stratégie, ne doutons pas qu'elle sera encore davantage exploitée lors de la prochaine élection présidentielle, et en premier lieu par les extrêmes. Elle a pour principal effet de discréditer et d'affaiblir la représentation nationale et la démocratie représentative. Il est regrettable que l'exécutif, en croyant se protéger, s'y prête, même par intermédiaire, en nous faisant supporter encore une fois une repentance pour autrui.

M. Loïc Hervé. Très bien !

M. Jacques Mézard. Je regrette que le Président de la République ait déclaré à Tulle, le 18 janvier 2014 : « Je n'ai jamais été candidat comme sénateur, c'est le seul regret que je peux nourrir – enfin, je ne suis pas sûr que ce soit un regret. » (MM. Yvon Collin et Henri de Raincourt s'exclament.)

Ce débat a un sens, il a un but : que chaque groupe, sans faux-fuyant, exprime clairement sa position sur la proposition n° 10 de ce rapport.

M. Yvon Collin. C'est sûr !

M. Jacques Mézard. Toute opinion est respectable en démocratie. Ce qui est condamnable, c'est le double langage au gré des commandes à géométrie variable des appareils partisans.

En guise d'exemple éclairant de double langage, je vous cite une phrase prononcée dans les murs du Sénat en avril 2014, lors d'un débat sur le bicamérisme : « Le bicamérisme est l'alliance de la puissance quasi sacrée du suffrage universel direct et de la richesse de nos territoires ; il est la vie et l'histoire des individus ancrées dans la diversité de notre géographie. Ainsi, le bicamérisme est la traduction institutionnelle de ce qui caractérise notre pays : l'unité dans la diversité. »

Qui a prononcé cette phrase ? Le président de l'Assemblée nationale lui-même ! (Exclamations ironiques sur les travées du RDSE, de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)

Mme Françoise Laborde. Incroyable !

M. Henri de Raincourt. Magnifique !

M. Jacques Mézard. Vais-je y ajouter un extrait du discours d'investiture du président Bel ? J'avais cru, alors, à la sincérité de ses propos.

M. Henri de Raincourt. Cela, c'était une erreur ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jacques Mézard. Je les cite : « Nous avons tous entendu l'appel des grands électeurs pour confirmer le Sénat dans son rôle de représentant et de défenseur des libertés publiques, des libertés individuelles, des libertés locales. »

Mes chers collègues, les Français, dans ces heures graves qui marquent depuis janvier leur vie quotidienne, attendent-ils une énième réforme des institutions ? Peut-on invoquer à juste titre la stabilité des institutions comme rempart à l'accumulation d'événements dramatiques et vouloir, dans le même temps, les bouleverser ?

M. Yvon Collin. Non !

M. Jacques Mézard. Sécurité, emploi et pouvoir d'achat sont les vrais soucis de nos concitoyens.

Soyons directs : quand un exécutif se fragilise, il cherche naturellement des causes extérieures. Ce fut le cas du général de Gaulle après mai 1968 ; c'est aussi le cas aujourd'hui. Il est trop facile et injuste d'imputer les responsabilités à la représentation nationale, et au Sénat en premier lieu.

Qu'est-ce qui justifierait une strangulation du Sénat ?

Est-ce la qualité de son travail législatif ? Je le dis sans forfanterie, la grande majorité des universitaires, des journalistes spécialisés, des cadres de ce pays et les ministres en exercice eux-mêmes – espérons-le, sans double langage ! – déclarent que le travail du Sénat est, en général, de meilleure qualité que celui de l'Assemblée nationale par sa réflexion, son analyse technique et sa distance par rapport aux directives de l'exécutif.

M. Yvon Collin. C'est vrai !

Mme Sylvie Goy-Chavent. Très bien !

M. Jacques Mézard. Aussi, pourquoi réduire quasiment à néant le pouvoir législatif d'un Sénat dont l'action en ce domaine est reconnue comme très performante ?

Supprimer le pouvoir législatif du Sénat rendra-t-elle l'Assemblée nationale plus performante, plus libre, plus efficace et plus tolérante qu'aujourd'hui ? (Non ! sur les travées du RDSE et de l'UDI-UC.)

Qui représentera les territoires, les collectivités, ce qui est notre mission constitutionnelle ? Est-ce parce que le Sénat refuserait de se rénover, de se moderniser ? (Mêmes mouvements.) Mes chers collègues, la réponse est dans les actes. Qui a pris des initiatives fortes pour moderniser l'action parlementaire et le Sénat, et cela de façon accélérée tout au long de cette année 2015, pour développer l'utilisation des techniques de communication avec nos concitoyens, améliorer la réactivité lors des questions au Gouvernement, assurer la présence effective des sénateurs en commission, en séance, et accroître encore la qualité des rapports ? (C'est nous ! sur les travées du RDSE, de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)

L'Assemblée nationale a-t-elle fait mieux ? (Non ! sur les mêmes travées.) À ce jour, en tout cas, elle n'a pas fait autant que le Sénat pour se rénover. Avant de donner des leçons aux autres, il est bon de balayer devant sa porte...

M. Yvon Collin. Absolument !

M. Jacques Mézard. Au reste, ce qui se passe aujourd'hui au plus haut de l'Assemblée nationale sur le principe de non-cumul des mandats est révélateur du « fais ce que je dis, mais pas ce que je fais ». (Bravo ! et applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)

Dans son discours du 19 novembre 1968, le président Monnerville disait, parlant de Clemenceau : « C'est peut-être du jour où il est devenu sénateur qu'il a commencé à être un véritable homme d'État, parce qu'il était plus réfléchi, plus calme, plus posé, sans abandonner aucune de ses idées. »

Mes chers collègues, il est plus que temps que nous accueillions en notre sein nombre de hauts responsables de la République afin qu'ils deviennent plus sages ! (Rires sur les travées du RDSE, de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.)

Le même président Monnerville déclarait, quelques phrases auparavant, paraphrasant l'exécutif de l'époque : « Le malaise semble s'installer encore davantage dans la vie de la nation, précipitons-nous sur la réforme des régions et du Sénat. » Mêmes causes, mêmes artifices, mêmes vieilles recettes...

Enfin, le plus important, ce qui doit, au-delà de nos différences de sensibilité, nous rassembler pour enfouir ce mauvais rapport dans les poubelles de l'histoire, et ce qui a toujours été l'honneur du Sénat, c'est la défense des libertés publiques et des libertés individuelles ! C'est là le cœur du bicamérisme à la française. (Très bien ! et applaudissements sur les mêmes travées.)

Après Georges Clemenceau, François Mitterrand et Michel Debré ont siégé au Sénat dans le groupe que j'ai l'honneur de présider.

François Mitterrand a toujours défendu le Sénat, et je ne citerai qu'une phrase de Michel Debré, extraite de son ouvrage Refaire la France : « S'il y avait la chambre unique, le Gouvernement perd son premier appui : il devient simplement la réunion des commissaires de la majorité. »

M. Pierre-Yves Collombat. C'est exact, et c'est le but !

M. Jacques Mézard. Le Sénat est-il moins sensible aux évolutions sociétales ? Bien sûr que non ! Le souvenir, encore si présent dans nos murs d'Henri Caillavet, de Robert Badinter et de tant d'autres, en est la marque : avortement, divorce, abolition de la peine de mort, mariage pour tous et, plus récemment, sur l'initiative de notre groupe, la recherche sur les cellules souches embryonnaires.

Le Sénat a majoritairement voulu voter ces réformes. Dois-je rappeler à nos collègues socialistes que le Sénat a adopté, voilà trois ans, le droit de vote des étrangers et que l'Assemblée nationale est restée muette !

Mme Éliane Assassi. Exactement !

M. Jacques Mézard. Disons-le, souvent, les exécutifs n'apprécient pas le Sénat et le marginalisent, encore aujourd'hui, considérant qu'il est une perte de temps, un obstacle, une assemblée où l'expression de votes libres, d'insoumission d'apparatchiks de tous poils et dans la tradition, est facilitée par l'élection au deuxième degré.

Être libre de son vote, être capable de dire à un gouvernement, à ses propres amis politiques : « Je pense que vous vous trompez, je ne vous suivrai pas dans cette voie », c'est l'essence même du bicamérisme, c'est l'honneur du Sénat de la République.

Mes chers collègues, les sénatrices et sénateurs de mon groupe défendront le bicamérisme et le Sénat de la République, parce qu'ils défendent l'équilibredes institutions, l'expression des territoires et, par-dessus tout, les libertés publiques – cette liberté qui est le premier mot de notre devise nationale et qui, en cette heure, est plus universelle que jamais. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains. – MM. Éric Jeansannetas et Jean-Pierre Sueur applaudissent également.)

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19 novembre 2015 4 19 /11 /novembre /2015 17:15
La classe politique,
victime collatérale du terrorisme.

La seule réponse des politiques semble être de proposer de nouvelles lois et de faire montre d’ambition.

Depuis les attentats du 13 novembre, le personnel politique nous offre un spectacle absolument lamentable. Incapables de prendre de la hauteur, ils se déchirent et chacun y va de sa proposition imbécile, dans une sorte de concours Lépine absolument sidérant. A droite, c’est même un festival, avec la palme revenant à Laurent Wauquiez et sa proposition d'interner tous les suspects. Tous ces «ténors» ont pu donner leur pleine mesure lors de la séance des questions au gouvernement, à l’Assemblée nationale. Je ne parle même pas des plateaux de télévision, où ils ont surtout exposé leur médiocrité.

Le contraste est saisissant quand on écoute les propos responsables et éclairés de personnes comme le juge Trévidic, qui connaît son sujet. Cela fait des années qu’il prêche dans le désert et, pourtant, c’est lui qui a les bonnes solutions: se donner les moyens humains et matériels adéquats et, surtout, laisser ces gens faire leur boulot sans leur mettre des bâtons dans les roues. Le travail doit être mené en profondeur. On ne rattrape pas comme cela quarante ans d’abandon des banlieues, qui sont devenues un terreau fertile pour toutes les dérives radicales, qui prospèrent sur la misère économique et culturelle.

Surenchère

Malheureusement, la seule réponse des politiques, c’est de proposer de nouvelles lois, en urgence absolue. La réforme de l’état d’urgence, qui est quand même un régime d’exception en matière de libertés publiques, va être adoptée en moins de trois jours. On nous annonce une nouvelle loi antiterroriste dans les prochains mois. Cela doit être la quatrième loi «sécuritaire» depuis 2012 (et je dois en oublier). Et cerise sur le gâteau, une réforme de la Constitution. Là, j’ai juste envie de hurler. On ne touche pas ainsi à notre texte fondamental, qui n’est pas un gadget pour président en mal d’annonces spectaculaires. À chaque nouveau coup encaissé, on augmente la dose.

La prochaine fois, on ira réformer quoi? la déclaration des droits de l’homme de 1789? Il faut arrêter cette surenchère, toutes les personnes sensées savent que les textes de lois contiennent déjà tout l’arsenal nécessaire pour faire face à la situation. Il y en a même trop.

Ce qui manque, c’est la volonté politique de les appliquer. Un seul exemple: la loi de 1905 interdit toute propagande politique dans un lieu de culte. Initialement conçue pour contrer l’église catholique, cette disposition convient à merveille pour régler le cas des mosquées salafistes. Pourquoi ne pas la mettre en œuvre? Pourquoi attendre un événement gravissime pour, d’un seul coup, se lancer dans la surenchère et tout lâcher. Certes, l’état d’urgence va permettre de faire un grand ménage dans certains secteurs. Cela a déjà commencé dans les banlieues, avec des perquisitions qui permettent de trouver, quasiment à tous les coups, de la drogue et des armes. Mais n’aurait-il pas été possible d’agir plus en amont pour ne pas avoir à en arriver à mettre les libertés publiques entre parenthèses?

Déconnexion

La prochaine fois, on ira réformer quoi? la déclaration des droits de l’homme de 1789?

En plus de cette faiblesse pathologique des politiques, qui n’osent plus agir alors que c’est leur cœur de métier, nous avons aussi assisté au bal des ambitions comme jamais. Une fois de plus, Nicolas Sarkozy a fait honte à son camp. Sa seule préoccupation, depuis vendredi 13, est d’ instrumentaliser les évévènements pour sa carrière. Aucun sens du long terme, de l’intérêt général, et même de la décence. Une partie de la droite (et de l'extrême droite, Marine Le Pen n'est pas en reste dans la surenchère et la parade. Ndlr) lui a emboîté le pas, créant un décalage stupéfiant avec une population qui a encaissé le choc avec une grande dignité. J’ai vraiment l’image d’une classe politique hors sol, complètement déconnectée de ses électeurs.

Depuis vendredi, je me dis que, finalement, le pays s’en sortirait mieux s’il se débarrassait d’une partie de son personnel politique. Certes, il existe des élus tout aussi effarés que moi mais, par leur silence, ils ont cautionné les dérives des autres. Ce n’est guère que mercredi 18 qu’un sursaut a eu lieu, avec une séance de questions au gouvernement enfin digne. Je ne vois pas se dessiner une majorité d’élus pour arrêter la frénésie législative, se poser et adopter enfin les vraies solutions: laisser travailler ceux dont c’est le métier au lieu d’essayer de faire croire qu’ils sont omnipotents.

Plus que le terrorisme, qui m’inquiète beaucoup, le vide politique au sommet me terrifie. Nous n’aurons pas de véritable solution à nos problèmes sans un renouvellement profond de nos élites politiques. Soit elles s’adaptent et modifient radicalement leur manière de travailler, soit il faudra les virer. Parce que, là, ce n’est plus possible.

Cet article a été publié mercredi 18 novembre sur le blog d'Authueil. Nous l’avons reproduit sur Slate avec l’aimable autorisation de son auteur.

AUTHUEIL

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19 novembre 2015 4 19 /11 /novembre /2015 13:50
Françoise LABORDE Sénatrice de la Haute-Garonne , membre de l'exécutif du PRG.

Françoise LABORDE Sénatrice de la Haute-Garonne , membre de l'exécutif du PRG.

Proposition de résolution

visant à affirmer le rôle déterminant des territoires

pour la réussite d'un accord mondial ambitieux sur le climat 

Intervention de Françoise Laborde

 

M. le présidentLa parole est à Mme Françoise Laborde.

Mme Françoise Laborde. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, permettez-moi tout d'abord d'avoir une pensée pour les victimes de ce vendredi 13 novembre et leurs familles. Je veux rendre hommage aux forces de l'ordre, au personnel médical, aux services publics, bien sûr, mais aussi à tous nos concitoyens qui ont fait preuve de solidarité, de façon très spontanée. Je n'imaginais pas passer du Congrès de Versailles à l'examen de cette proposition de résolution, ici au Sénat, sans transition et sans quelques paroles de soutien et d'humanité !

Dans deux semaines, la France accueillera la vingt et unième conférence des parties à la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, la COP 21. Cette nouvelle étape dans l'élaboration de la réponse mondiale au défi climatique est très attendue.

Le dernier rapport du groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat confirme le réchauffement climatique, ainsi que son origine en grande partie humaine. Nous en connaissons les dangers immédiats, ainsi que les risques futurs. La multiplication des aléas météorologiques et l'élévation du niveau des mers entraîneront des bouleversements de l'environnement irréversibles, qui engendreront à leur tour des fléaux humanitaires tels que l'aggravation de l'insécurité alimentaire et les migrations environnementales, augmentant les risques de conflictualité.

J'ajouterai, en tant que membre de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, que ces dernières sont souvent les premières victimes des changements climatiques. Notre collègue Chantal Jouanno nous l'a fort bien expliqué.

Il n'est pas trop tard pour éviter le pire, d'autant que c'est l'ensemble de la communauté internationale qui reconnaît aujourd'hui la nécessité d'agir plus fermement et sans tarder pour limiter le réchauffement mondial à 2°C d'ici à 2050.

Face à ce défi universel, on peut donc déjà se réjouir de l'existence d'une volonté mondialement partagée. Par conséquent, la COP 21 peut – et doit – réussir.

Dans cette perspective, plusieurs principes doivent fonder cet accord. La proposition de résolution que nous examinons aujourd'hui les a intégrés dans ses considérants, en rassemblant, de façon très complète, tous les enjeux qui sous-tendent le changement climatique. Je salue à cet égard l'initiative du Sénat, qui a fait un excellent travail d'analyse et de prospective, au sein des différents organes saisis de ce sujet.

Le premier principe sur lequel je souhaitais revenir, c'est l'universalité des engagements. Comme je l'indiquais à l'instant, on s'y achemine par une prise de conscience généralisée, qui se concrétise aujourd'hui par une croissance du nombre d'engagements chiffrés de réduction des émissions de carbone.

Je rappellerai que seulement 35 pays industrialisés étaient liés par le protocole de Kyoto, adopté en 1997. À l'aube de la COP 21, 155 pays, sur les 195 États parties à la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, avaient déposé, au 30 octobre dernier, leurs contributions à la réduction de leurs émissions. C'est un bon signe, même si, à ce jour, la mise en œuvre de ces contributions aboutirait globalement à un réchauffement proche de 3°C. L'objectif de 2°C reste donc toujours à fixer d'ici au 10 décembre.

Second principe, l'accord doit être équitable. Les conséquences des changements climatiques doivent être traitées par tous, puisqu'elles nous touchent tous, mais on ne peut pas ignorer que la première responsabilité incombe aux pays développés, qui ont une dette carbone à l'égard des pays en développement et des pays les moins avancés. C'est le sens du fameux principe de responsabilités communes mais différenciées, qu'il faut réaffirmer et, surtout, appliquer par le biais d'engagements financiers fléchés au bénéfice de ceux qui en ont le plus besoin.

La réussite de la COP 21 dépendra des garanties qui seront mises sur la table pour l'alimentation du Fonds vert pour le climat. L'objectif de 100 milliards de dollars d'ici à 2020 devrait être concrétisé. La question reste cependant entière pour l'horizon qui s'étend au-delà.

Ensuite, l'accord doit être contraignant. Il s'agit non pas de mettre en œuvre des mécanismes de sanction, mais de s'accorder sur des outils de contrôle incitant aux bonnes pratiques. C'est le souhait de l'Union européenne et, au sein de celle-ci, de la France. Le Président de la République l'a souligné à Malte, la semaine dernière, en réponse aux propos du secrétaire d'État américain John Kerry.

En tout cas, j'ose espérer, madame la secrétaire d'État, que la diplomatie active menée depuis quelques semaines pour parvenir à un accord viendra à bout des quelques résistances manifestées sans complexe par ceux qui, en outre, sont les plus grands émetteurs de gaz à effet de serre.

Mes chers collègues, je terminerai en évoquant le rôle des territoires, que le Sénat a souhaité, conformément à sa vocation, inscrire au cœur des négociations sur le climat. Les territoires sont en effet un échelon pertinent de la politique environnementale. Comme cela est démontré dans le rapport de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, celles-ci ont depuis longtemps, en France, décliné le concept du « penser global, agir local ». Elles ne sont, heureusement, pas restées passives en attendant que les États nationaux dépassent le cap des tergiversations.

Nos collectivités doivent continuer leur transition énergétique tout en transmettant leur expertise aux pays en voie de développement par le biais de la coopération décentralisée. Mais, pour cela, pour qu'elles restent exemplaires, il faut qu'elles aient les moyens de leur politique. Sans vouloir ouvrir un débat que nous aurons ici même demain soir, je soulignerai que le rabotage régulier de leurs dotations oblitère leurs capacités d'investissement.

En attendant, mes chers collègues, la première urgence est de parvenir à un accord sur le climat engageant la responsabilité des États, au premier rang desquels les pays développés, qui ont un devoir de réparation. Les réunions tenues en amont à Paris la semaine dernière avec plusieurs ministres de l'environnement et de l'énergie ont envoyé de bons signaux. Il nous reste à souhaiter que toutes les intentions affirmées se transforment en actions responsables et solidaires au bénéfice de l'humanité tout entière. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur certaines travées de l'UDI-UC, du groupe écologiste, du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC.)

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17 novembre 2015 2 17 /11 /novembre /2015 18:04
Congrès à Versailles suite aux attentats du 13 novembre 2015 

DÉBAT SUR LES ATTENTATS TERRORISTES

INTERVENTION DE ROGER-GÉRARD SCHWARTZENBERG,

PRÉSIDENT DU GROUPE RADICAL RRDP

CONGRÈS DE VERSAILLES, 16 NOVEMBRE 2015

 

Au nom du groupe radical de l’Assemblée nationale, je m’incline avec émotion devant la mémoire des victimes de la tuerie de masse commise vendredi soir par des terroristes fanatisés.

Mes pensées vont aussi vers leurs familles, vers leurs proches, meurtris par cette épreuve tragique. Leur deuil est aussi le nôtre.

Je tiens à saluer l’action des forces de sécurité et des services hospitaliers qui ont tout mis en œuvre pour secourir les très nombreux blessés.

 

Qu’est-ce qui fait une civilisation ?

Finalement, qu’est-ce qui fait une civilisation ? Et en particulier la nôtre ?

Le respect de la vie, l’attention à autrui, le dialogue, la tolérance. Et, bien sûr, la fraternité.

C’est cela que les tueurs de Daech ont voulu détruire, avec leurs rafales de Kalachnikov.

Voici donc, en ce nouveau siècle, le retour de la barbarie, la résurgence de la violence et de la haine. Avec ces adeptes de l’obscurantisme, qui veulent imposer de force leur croyance à autrui. Comme au temps lointain des guerres de religion.

 

Unité nationale

Le terrorisme vise à inspirer la frayeur, la sidération. Ce résultat ne sera pas atteint dans notre pays. On ne cède pas au terrorisme. On le combat pour défendre la liberté. Et pour la défendre ensemble. Sans distinction entre nos différents partis.

Nos partis sont divers. Mais nous devons faire bloc et faire front. Nous devons réagir avec unité et nous rassembler face au terrorisme, qui cherche précisément à nous diviser.

La volonté de s’unir doit l’emporter quand l’essentiel est en jeu.

Dans les circonstances exceptionnelles d’aujourd’hui, l’heure n’est pas à la polémique. Il est au rassemblement autour de la République et de ses valeurs.

Nous soutenons l’action de l’Exécutif, les mesures prises dès la nuit de vendredi et les mesures qui viennent d’être annoncées tout à l’heure. En tout cas la plupart d’entre elles.

Mais un travail réel a déjà été fait depuis un an, à l’initiative du Premier ministre et du ministre de l’Intérieur.

 

Les armes législatives

Pour combattre Daech, il faut utiliser pleinement les armes législatives dont nous disposons. Et en particulier la loi sur la lutte contre le terrorisme du 13 novembre 2014.

Trois dispositions peuvent être très utiles.

-         D’une part, « tout ressortissant étranger peut, dès lors qu’il ne se trouve pas sur le territoire national, faire l’objet d’une interdiction administrative du territoire lorsque sa présence en France constituerait une menace grave pour l’ordre public ou la sécurité intérieure ».

-         D’autre part, ce texte de 2014 transfère de la loi du 29 juillet 1881 sur la presse à un nouvel article du Code pénal (article 421‑2-5) les délits de provocation au terrorisme et d’apologie du terrorisme.

L’objectif : des délais de prescription moins brefs et des procédures mieux adaptées.

Auparavant, en revanche, de 2001 à 2014, le délit d’apologie du terrorisme n’avait donné lieu à condamnation qu’à cinq reprises. Donc, 5 fois seulement en près de 15 ans.

-         Enfin, la loi de 2014 entend combattre le cyberdjhadisme. Car Internet est devenu le vecteur principal de la propagande, du recrutement et de l’incitation au terrorisme.

Désormais, « l’arrêt d’un service de communication au public en ligne peut être prononcé par le juge des référés » pour provocation à des actes de terrorisme ou apologie de ces actes « lorsqu’ils, constituent un trouble manifestement illicite, à la demande du ministère public ou de toute personne physique ou morale ayant intérêt à agir ».

Il importe que le Parquet utilise pleinement cette disposition  et saisisse davantage le juge des référés, en faisant preuve de réactivité et de vigilance.

 

La loi du 3 avril 1955 sur l’état d’urgence

Enfin, conformément à la loi du 3 avril 1955, l’état d’urgence, décrété en Conseil des ministres, ne peut être prorogé au-delà de 12 jours que par une loi qui en fixe la durée.

La durée de trois mois, qui est prévue, est brève. Peut-être trop brève. En tout cas, elle diffère d’autres précédents. Ainsi, après le putsch des généraux d’Alger, l’état d’urgence avait été appliqué pendant 2 ans, du 23 avril 1961 au 31 mai 1963. Ce qui était excessif.

 

Daech : un quasi-État

En fait, Daech est devenu un proto-État, un quasi-État.

Avec un large territoire en Syrie et en Irak. Avec un appareil public et une armée. Avec surtout un budgetconsidérable.

Selon les services américains, Daech engrangerait 3 millions de dollars par jour. Avec le système d’impôtsinstauré dans les territoires contrôlés. Avec le pillage des banques de ces territoires. Avec l’exportation du pétrole extrait des parties occupées de Syrie et d’Irak, souvent vendu au marché noir en Turquie : ce qui rapporterait 1,2 million de dollars par jour.

Enfin, selon certains observateurs, au moins initialement, certains États de la région, au sens large du terme, auraient apporté leur soutien financier à Daech, par l’intermédiaire de donateurs fortunés.

Il serait très souhaitable que ces pays, qui se disent les amis de la France, ne financent pas ses agresseurs. Et il serait opportun que notre diplomatie les invite à sortir de cette ambigüité, si elle existe encore.

Pour combattre efficacement Daech, il faut, en effet, tarir son financement. L’argent est le nerf de la guerre, mais aussi du terrorisme.

Par ses attentats sanglants, Daech nous a déclaré la guerre. Face à cela, il faut redire ce que disait Churchill dans d’autres circonstances, il y a 75 ans : « On ne nous verra ni faiblir ni faillir. »

 

Laïcité

La Constitution le rappelle dès son article Ier : « La France est une République laïque. »

Elle respecte toutes les croyances, mais sépare celles-ci de l’État.

Dans les circonstances présentes, la laïcité est plus que jamais nécessaire. À un double titre.

D’abord, elle est un principe de liberté. Liberté de penser, liberté de conscience, face à tout prosélytisme.

Ensuite, la laïcité est aussi un principe de fraternité. Elle permet à tous de vivre ensemble, par-delà les différentes appartenances confessionnelles.

La laïcité réunit et rassemble. Elle fédère. Elle renforce l’unité de la République.

Il importe donc de revitaliser la laïcité dans notre société, qui tend parfois à l’oublier.

 

Tolérance

Les terroristes de Daech veulent imposer leurs croyances par la force, par la contrainte. Ils refusent la liberté de conscience et veulent dicter leur loi.

Dans son « Traité sur la tolérance », Voltaire écrivait, il y a deux siècles et demi : « Puissent tous les hommes se rappeler qu’ils sont frères ! Qu’ils aient en horreur la tyrannie exercée sur les âmes ! »

Il faut bien se rendre à l’évidence : le genre humain n’est pas divisible, même sous l’effet des théologies rivales.

L’humanité est une.

De partoutdu monde entier, viennent des messages de soutien à la France meurtrie. Des messages de solidarité, de compassion et de concorde.

Cela s’appelle l’humanisme. Et le terrorisme n’y peut rien.

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17 novembre 2015 2 17 /11 /novembre /2015 17:58

Déclaration du Président de la République

devant le Congrès du Parlement à Versailles,

suivie d'un débat 16 Novembre 2015

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour le groupe du Rassemblement démocratique et social européen du Sénat.

M. Jacques Mézard. Monsieur le président du Congrès, monsieur le président du Sénat, monsieur le Premier ministre, mesdames et messieurs les ministres, mes chers collègues, Paris est meurtri et c’est toute la France qui saigne. Au-delà, sur toute la planète, les démonstrations d’affection et de soutien démontrent que ce sont les valeurs essentielles de liberté, d’égalité et de fraternité qui sont foulées aux pieds par ceux qui incarnent au plus haut point tout ce que ne doit pas être l’humanité : sectarisme, intolérance, haine, ingrédients de la barbarie.

Les assassins ont attaqué un mode de vie. Avec leur regard froid de tueurs, ils ont massacré de jeunes femmes, de jeunes hommes, nos enfants de cette France que nous aimons. Chaque photo de ces jeunes souriant, goûtant la vie avec joie, est une souffrance pour leurs familles et pour chacun d’entre nous. Pensons d’abord à eux, à tous les blessés qui luttent pour la vie, ainsi qu’à ceux qui se sont montrés héroïques, par un mouvement naturel ou de par leurs fonctions.

Chacun de ces visages, chacune de ces vies, est irremplaçable. Le moment est celui du deuil. Il doit être aussi, simultanément, celui de l’action. Le moment n’est pas à pointer les responsabilités, même si cela viendra forcément. Il est un temps pour tout.

Le malheur nous frappe. Sachons y associer tous ceux dans le monde qui viennent d’en être victimes : Russes, Turcs, Égyptiens, Libanais et tant d’autres... La France n’est pas la seule victime, pas la seule cible.

Le moment est celui du soutien unanime aux institutions de la République, une, indivisible et laïque, du soutien à nos forces de l’ordre, police, gendarmerie, armée, dont nous saluons la détermination et le courage et dont nous savons l’ampleur de la tâche épuisante depuis des mois dans ce contexte dramatique.

Au nom de mon groupe, je tiens à assurer au Gouvernement, au Premier ministre, au ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve, qui honore chaque jour sa fonction et la République (Applaudissements), notre soutien sans réserve pour défendre les institutions de notre nation. Quelles que soient nos appréciations quant à la politique étrangère qui a été menée, une priorité s’impose et ne souffre aucune réserve : faire face, faire face à Daech, faire face au terrorisme, ne pas reculer, ne pas baisser la tête, rester debout avec la fermeté, la froide mais calme détermination que requièrent les drames qui ponctuent la vie des nations.

Monsieur le Premier ministre, vous avez déclaré que nous sommes en guerre. Alors, comme le disait et le faisait le plus grand de vos prédécesseurs, auquel, par-delà nos différences, nous sommes tous deux très attachés, faites là !

Faire la guerre, c’est accepter d’en subir les conséquences. Si les Français prennent conscience de la gravité de la situation, ils attendent que tous les moyens soient mis en œuvre pour assurer la sécurité dans le pays. C’est la priorité des priorités !

Vous voulez une prolongation de l’état d’urgence ? Vous l’obtiendrez, sous le contrôle du Parlement ! C’est une restriction des libertés ? Oui ! C’est contraire à nos principes ? Oui ! Mais, pendant cette période de crise dramatique, si cela permet de sauver une seule vie d’innocent, nous vous accorderons cette confiance indispensable. (Applaudissements.)

Vous prenez la décision de fermer des mosquées où la haine est prêchée, de poursuivre des imams propagateurs de haine ? Vous avez raison et nous vous approuvons ! (Applaudissements.)

Comment ne pas rappeler ici que l’article 26 de la loi de 1905 dispose qu’« il est interdit de tenir des réunions politiques dans les locaux servant habituellement à l’exercice d’un culte », et que son article 35 dispose notamment que, « si un discours prononcé ou un écrit affiché ou distribué publiquement dans les lieux où s’exerce le culte, contient une provocation directe à résister à l’exécution des lois ou aux actes légaux de l’autorité publique », ceux qui commettent ces infractions sont passibles de deux ans de prison ? (Applaudissements.)

M. Alain Bertrand et M. Michel Bouvard. Excellent !

M. Jacques Mézard. Quand la IIIe République devait faire preuve de fermeté contre le pouvoir religieux dans la sphère publique, pourquoi la Ve République n’applique-t-elle pas la même loi contre ceux qui prêchent la haine et la mort dans nos murs ?

Le but clairement identifié de Daech est de diviser notre société. Tout ce qui concourt à marginaliser, à isoler de l’ensemble de la nation française les 5 millions de Français musulmans doit être condamné.(Applaudissements sur plusieurs bancs.) La minorité qui discrédite nos compatriotes musulmans doit être combattue car elle est d’abord l’ennemie de nos compatriotes de confession musulmane. (Mêmes mouvements.) Tout ce qui est un obstacle à l’intégration harmonieuse de ces derniers est un danger pour la République. Il est de la responsabilité, du devoir, de l’honneur de chacune et de chacun des responsables politiques de s’interdire tout propos discriminatoire vis-à-vis de compatriotes qui sont partie intégrante de la communauté nationale. (Mêmes mouvements.)

La graine de la division est facile à cultiver. Il nous appartient de l’empêcher de germer.

J’ai rappelé la loi de 1905. Ce rappel a deux objectifs

En premier lieu, affirmer le caractère laïc de notre République et exprimer au nom du groupe parlementaire qui l’a toujours incarné que toutes les dérives communautaristes que nous avons dénoncées ces dernières années sont incompatibles avec nos principes ; que cela commence à l’école et se poursuit dans tous les secteurs de la vie en société.

En second lieu, appeler une nouvelle fois l’attention du Gouvernement sur l’impérieuse nécessité, plutôt que de légiférer constamment en réaction aux événements, d’appliquer les lois existantes, dont l’arsenal est la plupart du temps suffisant. (Applaudissements sur plusieurs bancs.) S’il existe certaines lacunes dans la loi de 1955 et concernant les dérives de l’utilisation d’internet, comblez-les ! Mais aujourd’hui nos concitoyens n’attendent pas seulement de nouvelles lois : ils attendent de l’action en exécution des lois existantes de la République. (Mêmes mouvements.)

Dans ce contexte, la mobilisation de tous les moyens est indispensable et il serait inopportun et peu responsable de considérer que cela n’entraînera pas des besoins financiers supplémentaires, qui seront pris sur d’autres chapitres. Là encore une concertation en amont entre tous les groupes politiques et le Gouvernement est indispensable.

Je ne saurais m’abstraire, dans mon propos, des considérations internationales. Tout d’abord concernant l’Europe : la compassion exprimée par nos voisins est d’une profonde sincérité et nous devons l’apprécier en tant que telle, parce qu’aujourd’hui nos peuples n’ont jamais été aussi proches par leur mode de vie et leurs échanges économiques et culturels. Mais cela n’enlève rien à une constatation : c’est la France qui mène, trop seule sur le terrain, le combat de la défense des valeurs partagées par les nations européennes. Oui, nous pouvons espérer moins de directives et plus de soutien sur le terrain ! (Applaudissements sur plusieurs bancs.)

Il n’est pas inconvenant de souligner que globalement, face à la crise au Moyen-Orient et aux drames vécus par des millions d’êtres humains, la réponse européenne s’est trop caractérisée par l’égoïsme, l’absence de cohérence, quand ce ne fut pas le chaos. Et pourtant, il n’est de bonne réponse que dans le cadre européen.

Le Président de la République a raison de saisir le Conseil de sécurité de l’ONU et d’appeler à la cohérence de l’Europe ainsi qu’à une grande et unique coalition.

J’en viens aux décisions prises pour lutter en Irak et en Syrie contre Daech. Quand des soldats français sont en opération, le soutien de toute la nation s’impose de facto. Il s’impose d’autant plus quand la cible est une organisation criminelle bafouant toutes les valeurs.

Quand on fait la guerre, il faut unir tous ceux qui combattent le même ennemi, sans exception, du gouvernement en place en Syrie à la Russie et à la Turquie, et, comme le soulignent nombre de nos amis arabes, rechercher un consensus et un agenda avec les sensibilités et expressions locales. Si l’on nous dit, comme on le fait à juste titre, que la base de Daech est l’Irak, il faudra bien à l’avenir s’interroger et tirer toutes les conclusions nécessaires quant à l’opportunité des interventions des puissances occidentales en Irak par le passé, et, plus près de nous, en Libye.

En ces heures où la représentation nationale doit, autour du Gouvernement, être à la hauteur des enjeux, des inquiétudes des Français, ce qui nous réunit est plus fort que ce qui divise : c’est le visage d’une France fidèle à ses valeurs et à son histoire, confiante en sa jeunesse, que nous devons montrer, en rejetant toute tentative de récupération par qui que ce soit, en rassemblant toutes les sensibilités dans le respect de leur diversité.

Mes chers collègues, il est des moments où l’on a envie de crier sans emphase et avec toute la force de son être : que vive la République ! (Applaudissements.)

Intervention de Jacques Mézard

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour le groupe du Rassemblement démocratique et social européen du Sénat.

M. Jacques Mézard. Monsieur le président du Congrès, monsieur le président du Sénat, monsieur le Premier ministre, mesdames et messieurs les ministres, mes chers collègues, Paris est meurtri et c’est toute la France qui saigne. Au-delà, sur toute la planète, les démonstrations d’affection et de soutien démontrent que ce sont les valeurs essentielles de liberté, d’égalité et de fraternité qui sont foulées aux pieds par ceux qui incarnent au plus haut point tout ce que ne doit pas être l’humanité : sectarisme, intolérance, haine, ingrédients de la barbarie.

Les assassins ont attaqué un mode de vie. Avec leur regard froid de tueurs, ils ont massacré de jeunes femmes, de jeunes hommes, nos enfants de cette France que nous aimons. Chaque photo de ces jeunes souriant, goûtant la vie avec joie, est une souffrance pour leurs familles et pour chacun d’entre nous. Pensons d’abord à eux, à tous les blessés qui luttent pour la vie, ainsi qu’à ceux qui se sont montrés héroïques, par un mouvement naturel ou de par leurs fonctions.

Chacun de ces visages, chacune de ces vies, est irremplaçable. Le moment est celui du deuil. Il doit être aussi, simultanément, celui de l’action. Le moment n’est pas à pointer les responsabilités, même si cela viendra forcément. Il est un temps pour tout.

Le malheur nous frappe. Sachons y associer tous ceux dans le monde qui viennent d’en être victimes : Russes, Turcs, Égyptiens, Libanais et tant d’autres... La France n’est pas la seule victime, pas la seule cible.

Le moment est celui du soutien unanime aux institutions de la République, une, indivisible et laïque, du soutien à nos forces de l’ordre, police, gendarmerie, armée, dont nous saluons la détermination et le courage et dont nous savons l’ampleur de la tâche épuisante depuis des mois dans ce contexte dramatique.

Au nom de mon groupe, je tiens à assurer au Gouvernement, au Premier ministre, au ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve, qui honore chaque jour sa fonction et la République (Applaudissements), notre soutien sans réserve pour défendre les institutions de notre nation. Quelles que soient nos appréciations quant à la politique étrangère qui a été menée, une priorité s’impose et ne souffre aucune réserve : faire face, faire face à Daech, faire face au terrorisme, ne pas reculer, ne pas baisser la tête, rester debout avec la fermeté, la froide mais calme détermination que requièrent les drames qui ponctuent la vie des nations.

Monsieur le Premier ministre, vous avez déclaré que nous sommes en guerre. Alors, comme le disait et le faisait le plus grand de vos prédécesseurs, auquel, par-delà nos différences, nous sommes tous deux très attachés, faites là !

Faire la guerre, c’est accepter d’en subir les conséquences. Si les Français prennent conscience de la gravité de la situation, ils attendent que tous les moyens soient mis en œuvre pour assurer la sécurité dans le pays. C’est la priorité des priorités !

Vous voulez une prolongation de l’état d’urgence ? Vous l’obtiendrez, sous le contrôle du Parlement ! C’est une restriction des libertés ? Oui ! C’est contraire à nos principes ? Oui ! Mais, pendant cette période de crise dramatique, si cela permet de sauver une seule vie d’innocent, nous vous accorderons cette confiance indispensable. (Applaudissements.)

Vous prenez la décision de fermer des mosquées où la haine est prêchée, de poursuivre des imams propagateurs de haine ? Vous avez raison et nous vous approuvons ! (Applaudissements.)

Comment ne pas rappeler ici que l’article 26 de la loi de 1905 dispose qu’« il est interdit de tenir des réunions politiques dans les locaux servant habituellement à l’exercice d’un culte », et que son article 35 dispose notamment que, « si un discours prononcé ou un écrit affiché ou distribué publiquement dans les lieux où s’exerce le culte, contient une provocation directe à résister à l’exécution des lois ou aux actes légaux de l’autorité publique », ceux qui commettent ces infractions sont passibles de deux ans de prison ? (Applaudissements.)

M. Alain Bertrand et M. Michel Bouvard. Excellent !

M. Jacques Mézard. Quand la IIIe République devait faire preuve de fermeté contre le pouvoir religieux dans la sphère publique, pourquoi la Ve République n’applique-t-elle pas la même loi contre ceux qui prêchent la haine et la mort dans nos murs ?

Le but clairement identifié de Daech est de diviser notre société. Tout ce qui concourt à marginaliser, à isoler de l’ensemble de la nation française les 5 millions de Français musulmans doit être condamné.(Applaudissements sur plusieurs bancs.) La minorité qui discrédite nos compatriotes musulmans doit être combattue car elle est d’abord l’ennemie de nos compatriotes de confession musulmane. (Mêmes mouvements.) Tout ce qui est un obstacle à l’intégration harmonieuse de ces derniers est un danger pour la République. Il est de la responsabilité, du devoir, de l’honneur de chacune et de chacun des responsables politiques de s’interdire tout propos discriminatoire vis-à-vis de compatriotes qui sont partie intégrante de la communauté nationale. (Mêmes mouvements.)

La graine de la division est facile à cultiver. Il nous appartient de l’empêcher de germer.

J’ai rappelé la loi de 1905. Ce rappel a deux objectifs

En premier lieu, affirmer le caractère laïc de notre République et exprimer au nom du groupe parlementaire qui l’a toujours incarné que toutes les dérives communautaristes que nous avons dénoncées ces dernières années sont incompatibles avec nos principes ; que cela commence à l’école et se poursuit dans tous les secteurs de la vie en société.

En second lieu, appeler une nouvelle fois l’attention du Gouvernement sur l’impérieuse nécessité, plutôt que de légiférer constamment en réaction aux événements, d’appliquer les lois existantes, dont l’arsenal est la plupart du temps suffisant. (Applaudissements sur plusieurs bancs.) S’il existe certaines lacunes dans la loi de 1955 et concernant les dérives de l’utilisation d’internet, comblez-les ! Mais aujourd’hui nos concitoyens n’attendent pas seulement de nouvelles lois : ils attendent de l’action en exécution des lois existantes de la République. (Mêmes mouvements.)

Dans ce contexte, la mobilisation de tous les moyens est indispensable et il serait inopportun et peu responsable de considérer que cela n’entraînera pas des besoins financiers supplémentaires, qui seront pris sur d’autres chapitres. Là encore une concertation en amont entre tous les groupes politiques et le Gouvernement est indispensable.

Je ne saurais m’abstraire, dans mon propos, des considérations internationales. Tout d’abord concernant l’Europe : la compassion exprimée par nos voisins est d’une profonde sincérité et nous devons l’apprécier en tant que telle, parce qu’aujourd’hui nos peuples n’ont jamais été aussi proches par leur mode de vie et leurs échanges économiques et culturels. Mais cela n’enlève rien à une constatation : c’est la France qui mène, trop seule sur le terrain, le combat de la défense des valeurs partagées par les nations européennes. Oui, nous pouvons espérer moins de directives et plus de soutien sur le terrain ! (Applaudissements sur plusieurs bancs.)

Il n’est pas inconvenant de souligner que globalement, face à la crise au Moyen-Orient et aux drames vécus par des millions d’êtres humains, la réponse européenne s’est trop caractérisée par l’égoïsme, l’absence de cohérence, quand ce ne fut pas le chaos. Et pourtant, il n’est de bonne réponse que dans le cadre européen.

Le Président de la République a raison de saisir le Conseil de sécurité de l’ONU et d’appeler à la cohérence de l’Europe ainsi qu’à une grande et unique coalition.

J’en viens aux décisions prises pour lutter en Irak et en Syrie contre Daech. Quand des soldats français sont en opération, le soutien de toute la nation s’impose de facto. Il s’impose d’autant plus quand la cible est une organisation criminelle bafouant toutes les valeurs.

Quand on fait la guerre, il faut unir tous ceux qui combattent le même ennemi, sans exception, du gouvernement en place en Syrie à la Russie et à la Turquie, et, comme le soulignent nombre de nos amis arabes, rechercher un consensus et un agenda avec les sensibilités et expressions locales. Si l’on nous dit, comme on le fait à juste titre, que la base de Daech est l’Irak, il faudra bien à l’avenir s’interroger et tirer toutes les conclusions nécessaires quant à l’opportunité des interventions des puissances occidentales en Irak par le passé, et, plus près de nous, en Libye.

En ces heures où la représentation nationale doit, autour du Gouvernement, être à la hauteur des enjeux, des inquiétudes des Français, ce qui nous réunit est plus fort que ce qui divise : c’est le visage d’une France fidèle à ses valeurs et à son histoire, confiante en sa jeunesse, que nous devons montrer, en rejetant toute tentative de récupération par qui que ce soit, en rassemblant toutes les sensibilités dans le respect de leur diversité.

Mes chers collègues, il est des moments où l’on a envie de crier sans emphase et avec toute la force de son être : que vive la République ! (Applaudissements.)

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17 novembre 2015 2 17 /11 /novembre /2015 17:09

IL faudra poser aussi la question du financement de Daesh,  Une des actons à mener sera de bien cerner  les réseaux financiers des terroristes  et de tarir les sources. Les banques vont devoir être surveillées, il ne faudrait tout de même pas s'apercevoir que l'évasion fiscale  serve les interêts terroristes.

 

 

Qui fait la guerre à qui, à quoi et comment?

Moisés Naím Traduit par Micha Cziffra - Monde  pour WWW.Slate.fr

 

Nouvelles causes, nouveaux combattants, nouvelles armes : les actes de guerre ne sont plus l’apanage des États.

Autrefois, elles opposaient des tribus, des cités, des empires ou des pays. Mais aujourd’hui, qui fait à la guerre à qui? Ledit «État islamique» a déclaré la guerre aux États, aux religions et aux sectes. Ainsi qu’à des organisations comme al-Qaida, le Hamas, le Hezbollah et les talibans. Mais qu’est-ce au juste que l’«État islamique»? Malgré ses tentatives de passer pour un État et de remplir des fonctions qui incombent d’ordinaire à des gouvernements, l’EI (ou Daesh) n’a rien d’un État. Difficile à classer dans une catégorie précise, il s’agit d’une organisation islamiste non gouvernementale, militarisée et terroriste. Qui est du reste apatride.

 

Une «armée terroriste» fait la guerre à des valeurs

En réaction au carnage perpétré à Paris ce vendredi 13 novembre 2015, le président Hollande a déclaré:

«C’est un acte de guerre qui a été commis par une armée terroriste (…)»

Si les actes de guerre étaient jusqu’ici l’apanage des États-nations, cette époque est manifestement révolue. On assimilait les terroristes à des «groupes» ou à des «organisations». Maintenant, plus seulement.

Témoignant sa solidarité, le président Obama a déclaré:

«[Ces actes terroristes] ne sont pas seulement une attaque contre Paris, [mais] une attaque contre toute l’humanité et nos valeurs universelles. »

De ce point de vue, les cibles parisiennes ne représentaient pas un État-nation et ses citoyens, mais un ensemble de principes et de convictions. A l’évidence, nous avons besoin d’une nouvelle langue pour comprendre ce qui se passe. Plus d’une décennie après les attentats menés aux États-Unis le 11 septembre 2001, les idées sur la nature de la menace, ses causes, et le meilleur moyen de la combattre sont confuses; elles suscitent par ailleurs des débats aussi vifs que peu concluants.

 

Bombes artisanales, drones, cyber-attaques et kamikazes

Ce siècle a vu l’apparition de nouvelles formes de conflits armés et de combattants, mais aussi des techniques qui ont transformé les armes les plus fréquemment utilisées pour faire un maximum de victimes et de dégâts. Explosifs «faits maison», drones, cyber-attaques et kamikazes sont devenus les armes les plus courantes, les plus perturbatrices et les plus mortelles dans les conflits modernes.

Comme chacun sait, le recours à des auteurs d’attentats-suicides n’est pas nouveau. Durant la Seconde Guerre mondiale, par exemple, 3.860 pilotes militaires japonais, les «kamikazes» originels, ont mené des missions-suicides en tentant d’écraser leur avion sur les navires ennemis (seuls 19% y sont parvenus). Par contraste, entre 1981 et juin de cette année, 4.620 attentats-suicides ont tué 45.000 personnes. Ce bilan s’alourdit aujourd’hui avec, entre autres, les victimes du massacre parisien.

 

Une arme de plus en plus utilisée et qui s’est avérée d’une efficacité redoutable est l’engin explosif improvisée

Une arme de plus en plus utilisée et qui s’est avérée d’une efficacité redoutable est l’engin explosif improvisé. Il s’agit d’une bombe artisanale que les criminels posent généralement dans un lieu très fréquenté et déclenchent à distance via un téléphone portable ou une simple télécommande de porte de garage. Ces bombes s’apparentent au fond à des mines terrestres, des armes de guerre qui font depuis longtemps partie de l’arsenal militaire de tous les pays. Pendant la Seconde Guerre mondiale, elles n’ont contribué aux pertes militaires américaines qu’à hauteur de 5%, mais dans les guerres d’Irak et d’Afghanistan, l’écrasante majorité des GI tombés au combat ont été tués par ces armes. Depuis quelque temps, les engins explosifs improvisés ne sont plus seulement enfouis à proximité d’une route et déclenchés par télécommande au passage d’une voiture ou d’une troupe de soldats. Sanglées autour du corps d’un kamikaze moderne, ces bombes artisanales deviennent des armes dévastatrices et efficaces.

Autre arme qui est venue transfigurer la guerre du XXIe siècle: les drones, ces aéronefs non habités et pilotés à distance. La plupart des cadres d’al-Qaida, des talibans et de Daesh qui ont été tués [par les États-Unis, NDLR] ont été frappés par des missiles de drones militaires. Si à l’heure actuelle les principaux utilisateurs de drones armés restent les armées ultra-modernes de certains pays –au premier rang desquels les États-Unis– , ce n’est qu’une question de temps pour que des groupes terroristes se procurent des drones armés. Regrettablement, l’association engins explosifs improvisés et drones constitue une nouvelle arme puissante pour les partisans de la terreur.

Enfin, la cyberguerre. De nos jours, presque toutes les forces armées du monde disposent de ressources humaines et matérielles dédiées à la défense de leur pays contre des cyber-attaques, à l’espionnage et aux cyber-attaques contre d’autres États. De leur côté, les terroristes ont aussi appris à se servir d’Internet pour financer et coordonner leurs opérations, recruter dans le monde entier et lancer d’efficaces campagnes de propagande.

 

Armes en vente sur le Web et candidats au suicide

Ces quatre types d’armes qui ont changé le visage de la guerre ont ceci en commun qu’elles ne sont plus réservées aux gouvernements. Fini le temps où les armes les plus meurtrières étaient contrôlées par les armées professionnelles de certains États. Vous pouvez acheter un drone sur le Net ou y trouver un manuel de fabrication d’une bombe artisanale. Et si vous pouvez le faire, les terroristes aussi. De surcroît, certaines organisations terroristes ont des recrues prêtes à se suicider, une arme dont ne disposent pas les armées des démocraties contemporaines.

Les pratiques dans de multiples domaines de l’activité humaine – héler un taxi dans la rue ou réserver une chambre d’hôtel, par exemple –ont bien évolué. La guerre, qui n’échappe pas à ce phénomène d’évolution, est perturbée par des groupes et des individus qui allient technologies, nouvelles stratégies et nouvelles formes d’organisation. De sorte que sa nature même s’en voit radicalement modifiée.

Cela signifie-t-il que les terroristes bénéficient d’avantages qui leur assureront une victoire à long terme? Certainement pas! Mais pour les neutraliser et veiller à ce que des attaques comme celles qui viennent de frapper Paris ne se reproduisent pas, les démocraties devront changer radicalement leur approche de la guerre, des combattants, des armes, du renseignement et de l’espionnage. Pour enfin réussir à perturber les perturbateurs.

Moisés Naím

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17 novembre 2015 2 17 /11 /novembre /2015 14:09
Hervé Causse Universitaire et Professeur de Droit. Avocat. Membre du Parti Radical de gauche

Hervé Causse Universitaire et Professeur de Droit. Avocat. Membre du Parti Radical de gauche

Terrorisme - Hervé Causse
La courbe de la sûreté se substitue
aux courbes du chômage et du déficit :
la donne politique a changé.

La réunion du Congrès de Versailles, hier, a permis au président de la République de consacrer un virage dit sécuritaire. En vérité, c'est un virage vers la sécurité des citoyens, vers la sûreté, qui a été fait. On doit approuver cet acte politique et ce choix politique qui est à la fois de circonstance et de nature à rendre plus cohérente notre politique interne et notre politique internationale. Les événements dramatiques de Paris poussent à plus de cohérence politique ce qui donne une nouvelle politique. 

I. Une politique plus cohérente 

Au plan international, la France va un peu oublier le régime de la dynastie HASSAD, un peu oublier les griefs qu'elle nourrit contre la Russie et activer les amitiés occidentales (dont la demande d'assistance à l'Union européenne en vertu de l'article 42-7 du Traité sur le fonctionnement de l'UE) mais également activer ses amitiés moyen et proche-orientales. A un monde en désordre doit correspondre une diplomatie en ordre clair. 

Au plan interne, l'appel d'une plus grande sévérité contre les radicaux islamistes (qui déforment l'Islam) devrait aussi ajuster l'ensemble de sa politique judiciaire et policière. Les terroristes qui sont des délinquants condamnés à plusieurs reprises et qui ne sont jamais incarcérés posent désormais, à la vue de tous, un problème à régler. Les peines doivent être prononcées et exécutées, ce qui n'interdit pas les accompagnements utiles, pendant ou après la peine. 

Mais il est désormais acquis que l'on ne laissera plus se propager le sentiment que la France est faible, incohérente et désorganisée, car elle ne sait pas sanctionner les délinquants. Cette ambiance, réelle ou moins réelle, aide les délinquants à devenir des terroristes en herbe puis de redoutables terroristes tout court qui se renforce face laxisme. 

A l'extrême, c'est dans la défiance des jeunes qui accomplissent leur premières incivilités que le mal réside : cracher à la gueule d'un prof ou abandonner l'école. On peut sans doute dire que le temps du laxisme général qui caractérise si souvent la France est terminé. Ce qui nous concerne tous. 

Là, il me semble qu'il manque encore un discours sur l'école : on doit rappeler qu'elle n'est pas une option, qu'elle est obligatoire, pour les enfants et les familles et, outre des moyens, il faut dire aux jeunes qu'ils n'ont aucun avenir hors l'école et leur rappeler qu'ils ont là une chance que la plupart des enfants de la planète n'ont pas. Quand je dis il faut le leur dire, je veux dire qu'il faut le plaider avec force, dans un ton autre que celui que l'on entend depuis 40 ans. la société est très technique et innovante, l'importance de la formation a crû de façon exponentielle ! 

II. Une nouvelle politique 

Les attentats qui nous plongent dans la plus grande tristesse ont pour conséquence la "quasi-guerre" ou "proto-guerre" (termes du professeur R-G. Swhartzenberg devant le Congrès) que nous allons mener (et qui appelle un regain de civisme, voir mon texte du samedi 14), que les militaires français vont mener. Ils ont aussi deux séries de conséquences puisqu'ils changent la politique politicienne et la politique pure, 

Au plan de la politique quotidienne (ou politicienne...), la courbe de la sécurité vient de remplacer la courbe du chômage et la courbe du déficit public. C'est une nouvelle politique, un changement politique. Les prochaines élections jugeront les uns et les autres au vu de ce nouveau contexte. L'extraordinaire bulle du FN peut se dégonfler, les acteurs de l'Union nationale peuvent être consolidés pour aider à l'effort de guerre - mais seules les urnes décident. L'économique reviendra d'ici deux ou trois ans car on ne fait pas la guerre sans une économie, même si on fait la guerre avec des déficits. La chamaillerie politicienne va devoir être évitée, ce qui va élever le niveau du débat et ouvre à un vote plus éclairé et rationnel, moins impulsif. 

Au plan de la politique pure, celle qui est constituée de la prise en compte aux besoins de la population et de la réponse à l'intérêt général, l'évolution est plus profonde. Elle sera aussi plus durable même si elle va s'installer progressivement. Il n'y a pas un virage sécuritaire, mais un virage tout court. Il n'y a pas un virage du gouvernement, mais un virage de la France. Il n'y a pas un virage politique, mais un virage ethno-culturel. "D'un seul "homme" d'un seul", la France exige à l'unissons qu'on règle la problème qui vient de tous nous gifler, et d'emporter des visages si beaux et si jeunes. 

La nouvelle politique déployée correspond à un mouvement d'opinion neuf et différent. 

Ce virage politique ferme est opéré par François HOLLANDE qui pourtant incarne, depuis 24 mois, un "centre-gauche" souvent jugé sans colonne vertébrale. Ce virage est jusqu'alors bien accompli par ce gouvernement de "centre-gauche". Cette position politique le lui permet. En effet, nul ne peut leur imputer la volonté de vouloir attenter aux libertés, aux libertés publiques : président et gouvernement peuvent donc agir. Et le fait est qu'ils agissent car ils ne sont pas empêtrés dans le dogmatisme de l'extrême gauche. 

Le Président HOLLANDE va ainsi incarner la guerre, la force et la fermeté. Pour certains c'est un paradoxe, pas pour nous : d'avoir vu que certains sont mous au pouvoir pour être apparus si durs en campagne, nous avions anticipé que les mous seraient durs s'il le fallait. C'est dans ce contexte de sociologie du personnel politique que, en 72 heures, la politique de la France a changé, pour le bien de la République. 

L'exécution du plan de défense de la République est désormais la question posée. 

Mais le fait est : la donne politique a changé. 

 
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 Hervé Causse Professeur des Universités à l’Université d’Auvergne, depuis 2007, Avocat (spécialités officielles reconnues au Barreau, Droit des sociétés, Droit économique et Propriété intellectuelle), Barreau de Reims, 1994-2008. Avocat (spécialités officielles reconnues au Barreau, Droit des sociétés, Droit économique et Propriété intellectuelle), Barreau de Reims, 1994-2008. Agréé près le tribunal supérieur d’appel de Saint-Pierre-et-Miquelon, 1988-1991 
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17 novembre 2015 2 17 /11 /novembre /2015 08:21

Les principales déclarations de François Hollande

devant le parlement réuni en Congrès à Versailles

lundi 16 Novembre 2015,

trois jours après les attentats qui ont ensanglanté Paris.

 

"MEPRISABLES TUEURS"

"Notre République n'est pas à la portée de méprisables tueurs", a déclaré M. Hollande, pour qui "notre démocratie a triomphé d’adversaires bien plus redoutables, en vérité, que ces lâches assassins".

Pour le président, la France n'est pas engagée dans une "guerre de civilisation". Il faudra "du temps" et de la "patience" mais "l'ennemi n'est pas hors d'atteinte".

 

19 NATIONALITES

Le président a annoncé que les victimes des attaques de Paris et de Saint-Denis appartenaient à "19 nationalités"

 

ETAT D'URGENCE

Le Parlement sera saisi "dès mercredi" d'un projet de loi "prolongeant l'état d'urgence pour trois mois", en "adaptant son contenu à l’évolution des technologies et des menaces".

 

ATTENTATS

"Les actes de guerre de vendredi ont été décidés, planifiés en Syrie, ils ont été organisés en Belgique, perpétrés sur notre sol avec des complicités françaises", a affirmé le président.

 

SYRIE

Le président syrien Bachar al-Assad "ne peut constituer l'issue mais notre ennemi en Syrie, c'est Daech". M. Hollande veut "éviter" que l'organisation Etat islamique (EI) "n'utilise les combattants étrangers pour exécuter dans leurs pays les plans ourdis depuis la Syrie et l'Irak".

La France va "intensifier ses opérations en Syrie" et poursuivre "ces frappes au cours des semaines à venir".

Le président souhaite la mise en place d'une "grande coalition" internationale pour "détruire" l'Etat islamique.

 

REUNION DU CONSEIL DE SECURITE

M. Hollande a demandé une réunion du Conseil de sécurité de l'ONU "dans les meilleurs délais pour adopter une résolution marquant cette volonté commune de lutter contre le terrorisme", assurant que "la nécessité de détruire Daech constitue un sujet qui concerne toute la communauté internationale".

 

RENCONTRE AVEC OBAMA ET POUTINE

"Je rencontrerai dans les prochains jours le président Obama et le président Poutine pour unir nos forces et atteindre un résultat qui pour l'instant est encore renvoyé à trop longtemps", a-t-il déclaré. "La France parle à tous, à l'Iran, à la Turquie, aux pays du Golfe", a souligné le chef de l'Etat

 

CONTROLES AUX FRONTIERES DE L'UE

M. Hollande a demandé la "mise en place de contrôles coordonnés et systématiques aux frontières" de l'Union européenne, ainsi que "l'approbation avant la fin de l'année 2015" du fichier européen des passagers aériens (PNR) pour "assurer la traçabilité du retour des djihadistes et les interpeller".

 

DECHEANCE DE NATIONALITE

Une éventuelle déchéance de nationalité ne doit "pas avoir pour résultat de rendre quelqu’un apatride" mais "nous devons pouvoir déchoir de sa nationalité française un individu condamné pour une atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation ou un acte de terrorisme, même s’il est né Français, dès lors qu’il bénéficie d’une autre nationalité".

 

REFORME CONSTITUTIONNELLE

Le président souhaite "faire évoluer (la) Constitution pour permettre aux pouvoirs publics d'agir, conformément à l'état de droit, contre le terrorisme de guerre". Il estime notamment que l'article 16 qui régit les conditions d'attribution des pouvoirs exceptionnels au président et l'article 36 portant sur l'état de siège ne sont "pas adaptés à la situation que nous rencontrons".

 

GARDE NATIONALE

François Hollande a envisagé la création d'une "garde nationale" formée de "réservistes" de la Défense, représentant un "gisement" mais "insuffisamment exploité". "Les réservistes sont un élément fort du lien entre l'armée et la Nation, ils constituent les éléments qui peuvent demain former une garde nationale encadrée et disponible."

 

COP21

"Nous devons continuer, continuer, à travailler, continuer à sortir, continuer à vivre, continuer à influencer le monde: c'est pourquoi le grand événement international de la conférence sur le climat sera non seulement maintenu, mais sera un moment d'espérance et de solidarité."

 

REFUGIES

"Il est vital que l’Europe accueille dans la dignité ceux qui relèvent du droit d’asile mais renvoie dans leurs pays ceux qui n’en relèvent pas", a déclaré le chef de l'Etat. Pour lui, les habitants de Syrie ou d'Irak, "notamment ceux des territoires contrôlés par Daech, sont martyrisés et fuient".

 

NOUVELLES DEPENSES ASSUMEES

François Hollande "assume" le "surcroît de dépenses" lié aux décisions budgétaires prises en réponse aux attentats de Paris pour que "le pacte de sécurité l'emporte sur le pacte de stabilité" budgétaire européen. Ces dépenses "seront prises dans le cadre de la loi de finances pour 2016".

 François Hollande a annoncé la création de 5.000 emplois supplémentaires dans la police et la gendarmerie, 2.500 dans la justice et 1.000 dans les douanes pour faire face aux menaces terroristes, ainsi que la suspension de la réduction des effectifs militaires jusqu'en 2019 (soit plus de 9.200 initialement prévues entre 2017 et 2019).

 

LEGITIME DEFENSE DES POLICIERS

"La question de la légitime défense des policiers et des conditions dans lesquelles ils peuvent faire usage de leurs armes devra être traitée toujours dans le cadre de l'état de droit", elle fera l'objet d'un "important chantier législatif", qui sera entrepris "sans délai" par le gouvernement. 

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16 novembre 2015 1 16 /11 /novembre /2015 21:33
Faudra pas trop chatouiller les bretons.

Faudra pas trop chatouiller les bretons.

Texte de l'allocution de la Ligue des droits de l'homme

au rassemblement du 15/11/2015,

place de la Liberté, Brest.


 

L’assassinat de plus de 120 personnes à Paris dans la nuit du 13 au 14 novembre 2015 restera comme un des pires outrages infligé aux habitants de ce pays. Ces actes provoquent l'horreur et la révolte. Des dizaines de blessés luttent encore contre la mort et beaucoup porteront des séquelles qui ne sont pas prêtes de s'effacer.

C’est d’abord aux victimes et à leurs familles que nous pensons aujourd'hui en toute solidarité et avec émotion.

C'était un début de week-end comme les autres. Le temps de la détente, des retrouvailles entre amis,un soir de match, un soir de concert, un soir à rester discuter à la terrasse des bistrots à refaire le monde, à rire et à boire, à s'embrasser et à s'aimer.

En janvier les assassins avaient visé des lieux symboliques de leur haine de la liberté d'expression comme à Charlie Hebdo ou de leur haine des Juifs comme à l'hypercasher

Ce vendredi 13 novembre ils ont visé notre société toute entière dans sa diversité, dans sa pluralité.Ce vendredi ils ont tué, animés par la haine de notre société de libertés.

Au delà de Paris, au delà de la France et de sa politique étrangère, ils ont voulu atteindre notre société construite sur le principe de l'égalité des droits sans distinction de naissance, d'origine, de croyance, de couleur de la peau, d'apparence ou de sexe. Ils ont choisi des lieux symboliques de la pluralité et des rencontres.Ils ont visé un collectif composé d'une multitude d'individualités qui se lient les unes aux autres pour former une société. Une société de libertés individuelles et de droits collectifs.

En semant la mort, ils veulent que la peur s'installe. Nous ne céderons pas à cette peur.

Nous la surmonterons en restant une société de droit, ouverte et démocratique, respectueuse des libertés individuelles.

Notre pays a le devoir de poursuivre les assassins et leurs commanditaires pour les traduire en justice. Il est légitime qu'il s'en donne les moyens mais sans jamais s'abaisser à mettre la démocratie entre parenthèses. Il nous faut, citoyens comme élus, dépasser notre colère, rester lucides pour ne pas tomber dans le piège béant qui nous est tendu, celui de la renonciation à nos valeurs fondatrices, le droit et la justice.

Ces événements horribles se sont produits dans un contexte déjà lourd de crises, économiques, sociales, écologiques, dans un temps où des milliers de femmes d'hommes et d'enfants sont morts en mer aux portes de l'Europe qu'is tentaient de rejoindre.

Non le danger ne vient pas de mon voisin parce qu'il est étranger ou musulman. Le danger vient de tous ceux qui nous voudraient semblables à eux dans le refus de la diversité et des différences.

Faire face au terrorisme, défendre nos valeurs de fraternité c'est pour nous, ici à Brest, continuer à accueillir les migrants dans la dignité. C'est affirmer que notre république restera une société fraternelle et ouverte. Faire face au terrorisme c'est faire bloc, pour défendre une France diverse, plurielle, qui refuse les amalgames et les boucs émissaires.

Cette société que les tueurs, mais aussi les racistes et les xénophobes voudraient fermer, cette société qu'ils voudraient voir se recroqueviller sur elle même, nous en défendons plus que jamais l'ouverture.

Non nous n'aurons pas peur, sauf de nous mêmes, si nous perdions notre boussole républicaine.

Non nous ne céderons pas à ces peurs.

 

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16 novembre 2015 1 16 /11 /novembre /2015 20:51

COMMUNIQUE

Lundi 16 novembre 2015

Jean-Michel Baylet salue le discours et la détermination du Chef de l’Etat.

François Hollande a fait preuve de hauteur de vue et préconisé les bonnes mesures tant en politique intérieure que sur la scène internationale.

En mettant la sécurité au premier rang de ses propositions, il a répondu aux préoccupations fondamentales des Français.

Le Président de la République a aussi envoyé un message clair aux ennemis de la France : Nous les combattrons jusqu’à l’anéantissement.

Unis derrière le Président de la République, les radicaux voteront les lois et révisions constitutionnelles annoncées et soutiendront toutes les mesures permettant de défendre la République. 

Communication PRG

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